mercredi 21 février 2018

Mennel Ibtissem, Rokhaya Diallo : erreurs de casting ou dangereuse normalisation des fractures communautaires ?






Facho, raciste, islamophobe, nazi feminazi ou encore suppôt des blancs, négresse de maison, beurette de service, harki, traître à ton peuple" sont des insultes que vous pourriez recevoir si votre avatar sur les réseaux sociaux permet de savoir que vous êtes de “race arabe” ou “race musulmane” comme disent certains qui, après avoir cherché à lutter contre une hiérarchisation des “races” ont fini par en inventer une nouvelle.


C’est un champ de mines idéologique que nombreux tentent de traverser depuis l’affaire de Mennel Ibtissem. Le challenge se révèle dur à relever pour les novices ou non qui voudront prendre la parole. Les trolls prompts à coller des étiquettes et adeptes du cyber-harcèlement les attendront au tournant, le doigt sur la cliquette prêt à vous signaler en masse auprès du réseau social afin de vous réduire au silence pour quelques heures au mieux, à jamais au pire.



D’autres profitent de ce silence pour se rendre omniprésents dans les médias, devenant seuls porte-parole d’une communauté que l’on réduit à un bloc monolithique. La bienveillance fait énormément de tort à la prise en compte de paroles plurielles, car elle s’associe à l’idée, assez empreinte de stéréotypes, qui empêche d’envisager un musulman ou une musulmane comme une personne singulière et non l’exemple type de ce que pensent “les musulmans”.
Les courants religieux conservateurs sont nombreux, et leur réponse à ce que recherchent leurs fidèles n’y est pas étrangère. La liberté de conscience, qui comprend la liberté religieuse, permet aux français de choisir le culte qui leur convient. Néanmoins, en France seul le néoconservatisme islamique trouve autant de relais en dehors de ses propres fidèles.  
Toujours au même rythme, des tribunes, des prises de parole à la télévision, nous proposent la même soupe réchauffée, elle a un goût insipide mais assez familier.  Les mêmes têtes proches des mêmes associations, les mêmes débats et surtout les mêmes procès d’intention.

La polémique entourant la candidature de Mennel donne comme une impression de déjà-vu, évoquant celle qui aura suivi l’éviction de Rokhaya Diallo du Conseil National du Numérique par le gouvernement. Encore une fois, il y avait un camp du bien, un camp du mal sans aucune zone de rencontre partagée.  
Dès que l’on se décide à prendre la parole sans réciter des prises de position apprises par coeur, il faut choisir entre garder sa dignité à défaut de pouvoir sauver sa réputation, protéger son anonymat en cas de confrontation à la horde de trolls qui sévit ou encore échapper à l’assignation à résidence doctrinale.

Nous pouvons souhaiter à Mennel de faire une belle carrière, loin de cette polémique, cependant nous ne pouvons pas nous réjouir de voir qu’encore une fois la voix des autres composantes de l’islam en France a été réduite au silence par ceux qui s’érigent en défenseurs des libertés grâce à un tribunal moral pour faute grave : l’alliance avec l’extrême droite.

Le procès pour association avec l'extrême droite

Dès le retrait de Mennel, qu'elle annonce dans un message émouvant destiné à ses fans, un procès débute pour participation à la campagne raciste dont elle aurait été victime.
Le nombre de tweets échangés est impressionnant. Le soir de l’émission plus de 150 tweets parlent de sa prestation, 96 % plébiscitent Mennel, sa voix, l’émotion qu’elle suscite, il y a même une dizaine de demandes en mariage. Le 4 février, AJ+ lui consacre un sujet qui comptera près de 1500 retweets et plus 2300 likes, en revenant sur le fait qu’elle ne soit “pas passée inaperçue”, et que si certains “n’ont retenu que son turban, c’est bien la voix de Mennel qui a conquis le jury”. La vidéo montre la religieuse gagnante de The Voice Italie et une participante musulmane voilée de The Voice Belgique,  en indiquant que c’est la première fois qu’une candidate de l’émission couvre ses cheveux en France. Ce court sujet d’AJ+ se termine sur une longue pause sur  la copie d’écran d’un tweet disant que “si le Printemps Républicain, Wauquiez et  le FN  ne s’en mêlent pas, elle va gagner” The Voice.
Suite aux informations tweetées le 4 février concernant ses anciens posts, plus de 3000 tweets débattent de son inclination pour les thèses conspirationnistes, notamment pour en  démontrer la banalité, ce qui n’est guère surprenant. Plus de 3000 tweets sont émis pour la soutenir ou affirmer qu’elle est victime de racisme (et cela dépasse les 14000 tweets après l’annonce de son retrait), et son message indiquant que sa “musique continuera d'exister et sera d’autant plus émouvante après ces événements” a reçu plus de 9000 likes, contre 331 retweets pour un tweet l’accusant d’être un “agent de propagande” et près de 670 pour se réjouir ou crier “victoire” suite à son retrait de The Voice.
En revanche plus de 3000 tweets s’inquiètent simplement de ses liens avec l’islam radical et les Frères Musulmans.

Les tribunes s’enchainent et même un article pointant des utilisateurs de Twitter qui auraient « participé à la polémique » avec la fachosphère.
Les détails de cette participation s'effacent devant la gravité morale d'une telle alliance : le choc face aux anciens propos de la jeune femme, l’inquiétude de voir les idées de prédicateurs néoislamistes rencontrer un engouement, « faver» un tweet de Conspiracy Watch donnant des informations, sont aussi condamnables que des attaques racistes et des insultes. Captures d'écran à l'appui ou non, les utilisateurs de Twitter incriminés, notamment des membres ou sympathisants du Printemps Républicain, reçoivent des messages insultants ou menaçants.
Citer Mennel Ibtissem devient plus grave que ses propos que l'on est sommé de mettre sur le compte de la jeunesse, ce que beaucoup de personnes pourraient comprendre, tant il est courant de se remémorer avec effroi ou humour les prises de position et engagements que l'on a eus à 20 ans.
Or, parmi les propos échangés, ceux d'autres musulmans tentent pourtant d'apporter une parole sur les idées des Frères Musulmans, leur omniprésence dans les médias et les contenus web que visionnent de jeunes français. Ce que des catholiques ou des baptistes pourraient faire en débattant des idées véhiculées par d'autres courants de leur religion, est rendu impossible pour les musulmans.

Pris au piège de cette disqualification pour alliance avec l'extrême droite, les musulmans qui tentent d'aborder la stratégie propagandiste de l'idéologie frériste ou salafiste, se découvrent « islamophobes », des « traîtres à leur peuple ».
Il y a une démarche attendue, solidaire vaille que vaille et protectrice face au racisme, dont la menace est permanente. Le racisme, qui est loin d'être éradiqué en France, peut ainsi devenir la carte de fin de débat, qui peut être gardée dans sa manche et utilisée sans limite en toutes circonstances.
Pire, la bienveillance systématique qui anime certains médias et personnalités aboutit à un paradoxe étonnant : la critique, la question, ne sont pas permises lorsque le sujet est lié à une personne issue des minorités, et ce même pour d'autres personnes issues de ces minorités, qui ne sont en revanche pas du tout ménagées dès qu'elles mènent une autre démarche que la loyauté communautariste « ethnique » ou religieuse. Leurs voix sont étouffées par cette bienveillance dont les identitaires communautaristes savent très bien abuser pour museler le débat.

Le fameux militantisme intersectionnel n’est d’aucun secours pour répondre à cette difficulté. C’est le moment où l’on tombe dans l’angle mort des causes communes. Personne ne veut pointer les choses qui dérangent et qui pourraient faire de l’ombre au mouvement global. Ce que l’on passe sous silence ne disparaît pas, loin s’en faut.

Une stratégie de neutralisation du débat qui fait aussi ses preuves ailleurs

Ce n’est pas un problème typiquement français. Malgré les différences majeures entre nos deux pays, aux Etats-Unis, Linda Sarsour, activiste musulmane née à Brooklyn, est passée maîtresse dans l’art de neutraliser le militantisme universel. Devenue omniprésente de nombre de causes défendant la justice sociale et les droits des femmes, elle en profite pour élargir la portée de ses revendications et de ses points de vue liés aux Frères Musulmans.
Elle a notamment indiqué que la charia était tout à fait raisonnable une fois que l’on en connaissait les détails, s’est moquée de la préoccupation de certaines américaines autour de la possibilité pour les femmes saoudiennes de conduire, étant donné qu’elles bénéficient de 10 semaines de congé de maternité, ce que les américaines n’ont pas.
Linda Sarsour se retrouve régulièrement au coeur de polémiques qui ont poussé de plus en plus de personnes à se désolidariser et à la nommer “fausse féministe”. Récemment le hashtag #YoudontspeakformeLinda (Linda tu ne parles pas en mon nom) a comptabilisé 6000 tweets désapprouvant ses propos lors de la Women’s March, mouvement fédérant des femmes américaines qui s’est constitué en réaction à l’élection de Donald Trump.
Au moment de la publication de témoignages #MeToo sur les réseaux sociaux, celle qui dit qu’avant, elle était une femme ordinaire, mais que depuis qu’elle porte le voile on sait qu’elle est musulmane, a récemment montré l’aboutissement du cloisonnement communautaire au profit des hommes orientaux : confrontée à un cas de harcèlement sexuel, elle aurait refusé d’aider la victime présumée, une jeune femme musulmane, et menacé de mettre sa carrière en péril car elle estimait que l’homme incriminé était un “bon musulman”, qui est désormais l’objet d’une investigation par la police de New-York.
Une fois que le verrou communautaire se referme, il appartient à la communauté d’y faire régner l’ordre et la loi selon ses propres codes comme le recommande, en France, la fondatrice du PIR Houria Bouteldja, qui expliquait notamment qu’il est normal qu’une femme noire ne porte pas plainte pour viol si l’auteur est un homme noir, afin de préserver la communauté noire. Un système de droits à la découpe, que nous n’aurions jamais pensé réalisable, se profile dans des pays où l’éventail des lois et la notion d’égalité des citoyens existent, malgré des imperfections très notables.

Au Canada aussi le politiquement correct et l’individualisation outrancière des droits créent d’étranges paradoxes. À force d’ériger les choix et libertés individuelles en droits fondamentaux, ce qu’ils ne sont pas toujours, les droits fondamentaux s’érodent, et c’est ainsi qu’il devient controversé de lutter contre l’excision, qui ferait partie de la culture inaliénable de certaines personnes. Si c’est au nom de la culture et de la religion, mutiler ne serait plus un crime et s’y opposer deviendrait la marque du racisme ?

Tout le monde s'empare du turban de Mennel, mais dans quel but ?

Étrangement, pendant que toute critique de Mennel est assimilée à une adhésion aux idées d'extrême droite, Alain Soral lui apporte son soutien. Après plusieurs condamnations liées à de l'antisémitisme ou du négationnisme, Soral serait soudain très engagé contre le racisme pour soutenir une jeune musulmane. À moins que cela ne cache un autre objectif en entretenant un raisonnement d'opposition binaire entre juif et musulman ?
Le site d'information subversive et complotiste Alterinfo, qui tout comme Soral fait toujours d'une obsession pour le "lobby sioniste" une base informative, soutient aussi Mennel. Elle est comparée à Amir, gagnant de The Voice de confession juive, pour démontrer une différence de traitement, un "deux poids deux mesures". De même, les sites comme librepenseur.org, ou encore Panamza, défendront la chanteuse avec cet argument.
Pas de référence à Slimane, qui a chanté en arabe comme l'a fait Mennel, lors d'une interprétation mémorable de Formidable de Stromaé. Ni d'allusion aux autres gagnants issus de minorités.

Tout cela nous fait voir la polémique autour de Mennel comme le signe d’un danger qui n’est en rien “un acharnement” comme le résument certains. Ni une simple manipulation des écrits de la jeune fille, manipulation motivée par la haine des arabes et des musulmans comme d’autres le disent.
Le “Camp Mennel” est unanime : si ce n’était pas pour les propos qu’elle a tenus à “15, 16 ans” comme on a pu entendre Leila Slimani le dire au micro de France Inter (et à qui donc nous rappellerons qu’elle était âgée de 20 ans), l’histoire se serait arrêtée là et Mennel aurait certainement gagné The Voice 2018… Vraiment ?


Laissez nous vous dire que nous ne l’espérons pas, pas qu’elle ne gagne pas, non. Bref, nous nous expliquons.

Si la candidature de Mennel a réveillé les trolls et têtes d’affiche prévisibles de la fachosphère qui se sont exprimés ici et là, animés par leur racisme et musulmanophobie, pour crier grand remplacement !, nous espérons que « cette histoire » ne se sera pas réduite à l’attaque raciste subie par une jeune française qui ne demandait qu’à chanter. En s’attachant à décrire une meute de loups agissant de façon unanime et coordonnée pour s’en prendre à Mennel, ce raisonnement fait habilement oublier les raisons pour lesquelles tant de personnes, et quelles personnes, ont débattu des ses posts controversés et de sa participation à The Voice.

Des gens ordinaires, mais aussi des féministes, des universalistes, des laïcs ont fait remarquer que l’on banalise le voile en le rendant cool et mode ou en le faisant passer pour un marqueur de féminité puis un outil de séduction comme l’aura martelé Rokhaya Diallo sur différents plateaux TV ou radio.
Mennel, une chanteuse de variétés, qui pourrait devenir une idole de la jeune génération porte le voile islamique à la Télévision, en France.
C’est une première !
Tout comme Rokhaya Diallo, Mennel Ibtissem entend rassembler le public autour d’une stratégie de division et de cloisonnement qui utilise le tissu comme frontière communautaire et vise à le rendre intouchable.

Dans un tweet récent, Philippe Marlière, poste un article datant de 2016 dans lequel l’historienne américaine JOAN W. SCOTT titre “Cette étrange obsession française pour le voile”.
Bien que l’envie de leur répondre que les Etat-unis, terre des crispations communautaires et de l’obsession pour la catégorisation raciale n’a aucune leçon de tolérance à donner à la France,- c’est court, ça clot aussi vite le débat que la carte de l’islamophobie et en plus dans ce cas, c’est juste-, oui, bien que l’envie soit là, nous allons plutôt expliquer en quoi cette exception française nous rassure.

Tout d’abord, dans l’éventail des lois françaises, le voile n’est pas plus stigmatisé que d’autres signes religieux. En s’attachant à l’idée qu’il est sur une femme, et qu’on ne doit aucunement porter atteinte à la dignité de cette femme, les néoislamistes et les antiracistes radicaux ont fait le tour de passe passe de le rendre indispensable. Une femme est fragile, elle a besoin d’être respectée, pourquoi ne pas lui permettre ce qui ne l’est pas aux autres ?

En se laissant peu à peu déborder par les revendications identitaires communautaires, le voile, comme le halal, devient un droit (ou un devoir ?) fondamental qu’il faut honorer absolument pour être conforme à l’affirmation de pays des droits de l’Homme.

Les barrières doivent tomber, quelles qu’elles soient, peu importe pourquoi elles sont en place. On ne distingue plus les discriminations qui tombent sous le coup de la loi des restrictions légales qui concernent tout autant les autres signes religieux. Ecole publique, contraintes professionnelles des milieux industriels ou du domaine de la santé, etc. : rien ne doit résister au voile, sinon c’est l’expression d’un racisme, d’islamophobie ou d’une résurgence coloniale comme l’aura tweeté Madjid Messaoudene, conseiller municipal, élu FG de la ville de Saint-Denis en charge de l’égalité femme / homme : “Le dévoilement des femmes musulmanes, révélateur d'une mentalité de colon” mais faut-il lui rappeler qu’historiquement, c’est bien un colon qui a voilé les femmes ?
Leila Babès, islamologue et auteure de “ Le voile démystifié” (ed. Bayard), s’est exprimée - indépendamment de l’affaire Mennel au sujet du voile islamique “Que les choses soient claires. Le voile n'est interdit que dans certains lieux (pour travailler dans les institutions de l'Etat). Mais pour autant qu'il soit indifférent que des femmes l'arborent dans l'espace public, il n'a jamais été, ni un droit, ni même une liberté !” Et nous ajouterons,  “encore moins une injonction divine”.


Les théologiens musulmans dont l’avis vaut la peine d’être écouté, prônant donc un Islam compatible avec la République, sont unanimes, le voile n’est mentionné nulle part dans le Coran. L’université d’Al-Azhar, plus grande université au monde, bastion des Frères musulmans, les a d’ailleurs rejoints sur cette question en validant le 02/07/2017, la thèse de doctorat de Moustafa Mhammad Rached sur le voile islamique.

Dr. Moustafa conclut que le voile est “plus une habitude qu’une obligation religieuse qui n’a d’islamique que «les bonnes intentions» de ceux qui défendent son port”.

Au nom de l’intersectionnalité, du sanglot de l’homme blanc et du féminisme musulman c’est à dire le féminisme approuvé par les imams et les néoislamistes, nous pourrions nous contenter de dire que ces “bonnes intentions” consistant à invisibiliser les femmes afin qu’elles s’évitent un viol au coin de la rue ou en allant aux toilettes comme au 7ème siècle, ces “bonnes intentions” consistant à draper les femmes de vertu pour les différencier des salopes qui l’ont “cherché, mérité”, qui “savent qu’elles le veulent”, ces “bonnes intentions” consistant à marquer d’un voile la femme libre à ne pas importuner par opposition à l’esclave, qui est “montable” n’importe où et n’importe quand, ces “bonnes intentions”, nous en avons besoin en France autant que de la peine de mort, c’est à dire pas du tout mais que ce qui se passe ailleurs, ne nous concerne pas et que nous n’avons aucune légitimité à le commenter, cela serait raciste !

Mais nous ne sommes pas des intersectionnels, ni de la fachosphère de droite ou islamiste, ni de la gauche-régressive. Nous refusons ces « bonnes intentions » paternalistes pour nous mais aussi ailleurs car nous refusons l’hérésie qui consiste à valoriser la différence religieuse aux dépens de l'humanité qui nous lie.
Nous témoignons donc de notre soutien inconditionnel, d’abord aux femmes qui luttent  contre les reliquats de la société patriarcale dans leurs pays et les abus qu’elles subissent de la part de leurs communautés, ensuite aux hommes qui les épaulent, nous souhaitons que partout, à terme, jamais plus des femmes ne soient prisonnières d’autrui ni d’une pensée rétrograde d’elles-mêmes.
Détourner le regard de leur combat car leur culture, leur couleur, leur pays ne seraient pas les nôtres, n’est-ce pas là le racisme ?

Le voile est arboré par obligation, militantisme islamiste ou endoctrinement, il est une véritable assignation à résidence identitaire. Il sert encore plus à marquer une séparation dans un pays où il n’est pas imposé par la loi. Il est une adhésion à la Oumma censée transcender les frontières et les nationalités .
Dans des milieux communautaires pratiquants, couplé avec le désir ou l’injonction de ne pas se "mélanger aux associateurs ou aux mécréants", il devient une mise au trou du fatalisme et du déterminisme desquels l’on ne voudra ni ne pourra se dépêtrer.

Sahîh Muslim rapporté par Abou Hourayra : le messager de Dieu a dit "Ne saluez pas les juifs et les chrétiens avant qu’ils ne vous saluent et quand vous les rencontrez sur les routes, forcez-les à passer sur la partie la plus étroite". "5389"

Des femmes peuvent tout à fait se faire l’écho de cette assignation à résidence identitaire.
S’il a été lancé par les Frères Musulmans pour impliquer les femmes et donner un visage positif aux préceptes de ce courant religieux, le féminisme musulman a un essor naturel car il restitue ces femmes dans l’acceptation d’une société séparée. Si elles l’acceptent, elles en sont fières et la défendent. Elles sont les petites mains d’une déculturation progressive et nécessaire à la réalisation des aspirations impérialistes de l’islamisme, un islamisme qui a de plus en plus besoin de place.  

Cette défense oblige les autres militantismes à s’aligner sur ces revendications, pour éviter d’aller contre la volonté des femmes musulmanes, qui sont ici censées être représentées dans leur ensemble, comme un bloc monolithique.

Ainsi, une minorité non seulement confisque la parole, mais intime le silence et l’immobilisme. On se demandera comment quelque chose que l’homme oriental aura imposé aux femmes pour se garantir un quota de vierges dans la société ou faire valoir sa virilité par l'oppression de sa ou ses épouses, ses sœurs et toutes les femmes de sa famille qui concentreraient son « honneur », pourrait jamais être présenté comme émancipateur pour les femmes autrement que par des escrocs.

Qui si ce n’est des escrocs vendraient le séparatisme culturel et la coexistence comme solutions d’apaisement quand ils finissent, dans le silence qu’ils instaurent, de détruire notre contrat social, notre base de valeurs communes ?

Silence, on voile

Qui si ce n’est un escroc prétextera la vertu, la pudeur, la chasteté et la volonté de ne pas tenter ni être tenté par des petites filles pour les voiler ? Le voilement des petites filles entraîne leur sexualisation. Si ce n’est pas l’escroquerie, c’est de l’ignorance qui pousse à cacher une tentation qui n’existe pas encore, sauf à sexualiser les petites filles.
Asif Arif, avocat dont le livre « Maîtriser la laïcité » est préfacé par le président de l’Observatoire de la laïcité Jean-Louis Bianco, a reçu dans l’un de ces podcasts, des prédicateurs expliquant qu’il faut mettre le voile à des enfants dès le jeune âge, pour les habituer à le porter plus tard et éviter une rébellion à l’adolescence. Cette pratique s’appelle de l’endoctrinement et du lavage de cerveau.
Donner de l’emphase au discours néoislamiste en faisant la publicité du voile participe à cet endoctrinement, non seulement vis à vis des jeunes, mais aussi en faisant en sorte que des adultes soient de moins en moins choqués que l’on invisibilise des petites filles en leur faisant porter le jilbeb qui les couvre jusqu’aux chevilles pour sortir dans la rue, aller et revenir de l’école, etc.  
C’est le résultat à craindre si le voile passe pour un accessoire de mode stylé dans des émissions aussi populaires et familiales que The Voice.

En serait-il de même pour des fillettes issues de familles protestantes ou catholiques conservatrices ? Elles auraient au moins la possibilité de décider d’adhérer à ce discours en découvrant qu’il y a d’autres modes de vie, et en prenant leur décision à l’âge adulte. Les médias et la société ne les renvoient pas en permanence à une image prédéterminée de la femme catholique ou protestante en s’essayant maladroitement à la “représentativité”.

Le plus grave, c’est qu’au nom d’une vision particulière de la tolérance et des droits des femmes, on en arrive à accentuer une pression religieuse et sociétale sur certaines filles, qui n’auront jamais autant de chances que d’autres de se déterminer, de penser par elles-mêmes. Ces fillettes françaises à qui l’on n’assure pas les mêmes droits fondamentaux que les autres au nom de la religion de leurs parents ou d’un héritage communautaire, nous les trahissons jour après jour et trahissons tout autant les garçons qui apprennent à visualiser concrètement la vertu et l’impudeur, plutôt qu’à développer la notion du consentement et de l’égalité.

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